Je n’oublierai pas ce coup de fil que j’ai reçu de la cadre du service oncologie du CHR Bon Secours à Metz : “On a eu 37 décédés en moins de 2 mois, les filles n’en peuvent plus. Il faut que l’on fasse quelque chose.”
Accompagner la fin de vie est un acte profondément humain : être au chevet d’un.e patient.e qui s’apprête à partir, ça va au-delà du geste médical.
Ce que les soignant.es donnent, c'est fait avec tout leur être dans sa globalité, en 3D - tête, cœur et corps.
Accepter d’être humain parmi les humains : accueillir ses propres limites.
Les soignant.es vous le diront et je les rejoins, "c’est un privilège et c'est intime", d’être auprès de celles et ceux qui traversent les derniers instants de leur vie.
C’est aussi une sacrée traversée qui exige des compétences émotionnelles, comportementales et relationnelles. Au risque d'en choqué.es certain.es, avoir des compétences spirituelles c'est même un must dans ce contexte.
‘’La mort est bien plus qu’un événement médical. C’est un temps de croissance, un processus de transformation. La mort nous ouvre aux dimensions les plus profondes de notre humanité. Elle éveille la présence, une intimité avec soi-même et ce qui est vivant.” Franck Ostaseski
Les défis des soignant.es confronté.es aux enjeux de la fin de vie ne sont pas à prendre à la légère : des silences lourds et des non-dits, des situations délicates entre le.la patient.e et ses proches, le désespoir, les attentes immenses….
Dans un contexte de tension plus ou moins latent, plus ou moins permanent, où les équipes manquent de temps et de moyens, l’accompagnement de la fin de vie peut devenir une charge émotionnelle démesurée.
Les patients qui confient leurs peurs, leurs regrets ou qui s’enferment dans un silence.
Les familles, elles, attendent des réponses, du réconfort et parfois l’impossible : l’espoir.
Les soignant.es qui sont perçu.es comme des piliers pouvant faire face à tout dont c’est le métier d’accompagner la vie jusqu’au bout.
Non, tous.tes ne sont pas formé.es à cela.
Oui, tous.tes naviguent entre le désir de bien faire, les manques de moyens de l'établissement et leurs propres limites humaines - de la fatigue physique ou mentale, des blessures parfois enkystées qui attendent d'être soignées, des deuils non-résolus.
Il est souvent difficile de trouver un endroit où déposer, sans culpabilité, sans la peur d’être jugé par ses pairs, l’impact bouleversant d’accompagner la fin de vie ou d'y être confronté.e.
Des situations qui les questionnent et qui me questionnent moi aussi, en tant que psycho-praticienne en psychothérapie neurobiologique et systémique, formatrice en intelligence émotionnelle.
Prendre soin des soignant.es : c’est agir pour un accompagnement systémique, digne et humain.
Comment accompagner sans s’épuiser physiquement, mentalement et émotionnellement ?
Comment développer la juste proximité pour accompagner avec le cœur et sans se perdre dans la douleur de l’autre ?
Comment être garant.e d’un accompagnement de qualité qui allient des savoirs-être ancrés dans une posture éthique et des compétences techniques ?
Face à une réalité difficile à gérer où histoires personnelles et contexte professionnel s’imbriquent étroitement, inévitablement nos soignant.es ont besoin :
D’outils concrets et efficaces pour reconnaître et accueillir ce qu’ils.elles vivent sans culpabilité,
Développer des compétences pour vivre ces défis émotionnels autrement,
Retrouver de la clarté et du sens dans leur mission d'accompagnement.
Soutenir celles et ceux qui prennent soin des patient.es et des familles, c’est aussi prendre soin de l’hôpital tout entier.
Les soignant.es qui accompagnent la fin de vie jouent un rôle essentiel dans le bien-être des patients et de leurs familles, mais aussi des équipes.
Investir dans l’accompagnement des équipes, c’est participer à une transformation humaine et sociale pérenne des établissements de santé.
C'est leur permettre de vivre leur besoin de soutien et d'encouragement dans la manière dont ils.elles associent le "cure" et le "care" malgré les exigences de leur métier et les contraintes organisationnelles.
C’est donner des clés pour :
Gérer les tensions et les conflits,
Composer avec les drames de vie,
Prévenir l’épuisement sous toutes ses formes,
Renforcer la cohésion d’équipe face aux défis de la fin de vie,
Redonner confiance aux soignant.es dans leur capacité à faire leur métier avec justesse et humanité.
Je n'ai pas froid aux yeux ! Je lance donc un appel aux décideurs, directeurs d’hôpitaux, chef.fes de service, cadres de santé : donnez-vous les moyens de vos ambitions par un accompagnement audacieux mais payant, qui fait le pont entre transformation intérieure et changement social.
Dites-moi si vous êtes dans l'ambivalence sur la nécessité de mettre en place des mesures qui ne peuvent plus attendre, et je vous dirai où vous vous situez au niveau du MTT.
En prenant en compte le facteur humain, les étapes et les leviers d'action qui permettent le changement sont accessibles et simples. Qu'attendez-vous ?
Comments